Comprendre les blocages autour des DSI

Dans de nombreuses organisations, privées comme publiques, les projets de transformation digitale échouent… non pas à cause de la technologie, mais à cause des équilibres internes. Derrière une apparente neutralité, les systèmes d’information deviennent parfois les victimes collatérales de tensions politiques, d’arbitrages flous ou de stratégies de pouvoir. Et dans cette configuration, le DSI se retrouve souvent seul.

Exemple courant : refonte SI gelée pour préserver un statu quo

Un projet de refonte d’un système d’information transversal, porté par une DSI à l’écoute des problématiques métiers, se retrouve subitement bloqué. Non pas pour des raisons techniques ou budgétaires, mais parce qu’il redistribue les responsabilités internes. Le département Finance, historiquement “propriétaire” des outils, perçoit la démarche comme une perte d’influence. Le Codir, soucieux de ne pas raviver de tensions, choisit… de temporiser. Résultat : le projet est gelé, les irritants persistent, et la dette technique continue de croître.

Le SI, terrain de jeux politiques

Ce type de situation est loin d’être isolé. Dans certains groupes, chaque direction défend son propre outil, son prestataire historique, son architecture maison. Le SI devient alors un terrain politique, où les initiatives transverses sont perçues comme des menaces.
Il ne s’agit pas ici de critiquer — ces dynamiques font partie de la vie des organisations. Mais elles doivent être comprises et intégrées dès la phase de cadrage. Sans cela, tout projet structurant risque d’être enterré avant même son lancement.

Les impacts d’un blocage silencieux

Ce qui rend ces situations complexes, c’est leur discrétion. Un projet non lancé, ce n’est pas un bug. Pas une crise. Juste… une opportunité manquée. Mais ces blocages ont des effets bien réels :

des outils obsolètes qui freinent la performance,
une dette technique qui alourdit chaque évolution,
une démobilisation progressive des équipes IT,
une perte de compétitivité insidieuse face à des concurrents plus agiles.

Stratégies de contournement observées sur le terrain

Certains DSI, dans ces environnements complexes, ont su faire avancer leurs projets malgré tout. Plusieurs approches méritent d’être partagées :

Co-construction dès le départ

Engager les métiers dans le diagnostic dès les premières phases. Faire émerger les priorités communes. Partager la responsabilité du projet, pour en faire une initiative collective plutôt qu’un projet IT.

Mettre en lumière les risques

Lorsqu’un projet reste bloqué, l’argument technique ne suffit plus. Mais le langage du risque — conformité CNDP, exposition sécurité, obsolescence réglementaire — parle souvent davantage au Codir.

Identifier des sponsors métiers

Un projet soutenu publiquement par le Marketing, les RH ou les Opérations gagne immédiatement en légitimité. Il devient transverse de fait, et non de discours.

Travailler le positionnement du DSI

Les DSI les plus écoutés ne parlent pas d’architecture ou de technologies. Ils parlent de marge, de croissance, d’expérience utilisateur. C’est en adoptant le langage stratégique que l’IT peut peser dans les arbitrages.

Un message à faire passer au-delà de la DSI

Ce type de blocage ne peut pas être résolu uniquement depuis la DSI. Il doit être reconnu par les métiers et les décideurs comme un signal faible de résistance organisationnelle. Ces articles — rédigés à partir d’observations concrètes dans des environnements marocains et francophones — ont pour but de mettre en lumière ces zones de tension. Pas pour dénoncer,mais pour inviter à une lecture plus globale des projets SI : technique, bien sûr, mais aussi politique, culturelle, humaine.